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ONISR : analyse critique article 40 millions d’automobilistes

mercredi 14 février 2018 , par Christian

Le document publié par l’association « 40 millions d’automobilistes » présente de nombreuses lacunes tant en ce qui concerne la méthodologie, l’interprétation des chiffres produits et la rigueur de la démarche.

Sur la méthodologie

Pour caractériser la période « avant expérimentation », le document se réfère à la période 2012 - mi 2015, soit 3 ans et demi, alors que les études d’accidentologie portant sur un réseau routier réduit sont systématiquement réalisées sur une période de 5 années pour une meilleure représentativité statistique.

Par ailleurs, les chiffres présentés laissent penser que les auteurs ont inclus dans leurs calculs l’ensemble des accidents intervenus entre les deux extrémités de chaque section expérimentale, sans prendre la peine d’exclure ceux intervenus sur des tronçons non couverts par l’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée (traversées d’agglomération, tronçons limités à 70 km/h, etc.).

Sur le détail des chiffres

Il résulte de ces lacunes que les chiffres cités sont totalement erronés. En annexe figurent les chiffres réels du bilan de l’accidentalité sur les trois axes expérimentaux.

La période 2010-2014 a été retenue pour caractériser la situation « avant expérimentation », de façon à éviter un biais potentiel lié à l’effet d’annonce de l’expérimentation au premier semestre 2015.

Sur la présentation et l’interprétation des chiffres

Indépendamment de la justesse des chiffres cités dans ce document, leur présentation et leur interprétation sont particulièrement tendancieuses.

En premier lieu nous rappellerons que l’interprétation de variations sur des nombres d’accidents ou de victimes aussi réduits doit impérativement s’accompagner de la vérification de leur significativité statistique, de façon à s’assurer qu’elles ne sont pas le simple « fruit du hasard ».

Par ailleurs on ne peut que s’étonner de constater que les conclusions associées au « bilan » produit pour chacun des axes ne sont pas symétriques selon que le nombre d’accidents augmente ou diminue. Ainsi :

  • sur la RN57, les auteurs ont relevé 6 accidents avant l’expérimentation (1,7 par an en moyenne) et 3 accidents pendant l’expérimentation (2 par an en moyenne) : le bilan est jugé « très mauvais » ;
  • en revanche sur la RN7, les 33 accidents avant l’expérimentation (9,4 par an en moyenne) comparés aux 11 accidents pendant l’expérimentation (7,3 par an en moyenne) conduisent à un bilan « non significatif » ;
  • et de même sur la RN151, les 14 accidents avant l’expérimentation (4 par an en moyenne) comparés aux 4 accidents pendant l’expérimentation (2,7 par an en moyenne) sont jugés comme un bilan « très mauvais » !

Enjeux d’accidentalité sur ces routes nationales

Enfin, l’auteur compare l’accidentalité sur ces trois routes nationales, rapportée à leur linéaire, à l’accidentalité sur l’ensemble du réseau bidirectionnel. Il convient de noter que sur ces routes nationales, le trafic est comparable à celui qu’on observe sur les anciennes routes nationales transférées aux départements et autres routes départementales à enjeux (11 200 véhicules/jour sur la RN7, 9 200 véhicules/jour sur la RN57 et entre 2 500 et 6 000 véhicules par jour sur la RN151).

Les accidents arrivent fatalement sur les routes les plus circulées. Ainsi, sur les routes nationales, l’accidentalité la plus élevée est de l’ordre d’un tué par an pour 15 km, la moins élevée de l’ordre d’un tué par an pour 60 km. Les tronçons sélectionnés ne faisaient pas partie des tronçons les plus accidentogènes. Sur le réseau principal départemental, le réseau le plus circulé d’un département peut observer une accidentalité de l’ordre d’un tué par an pour 40 km à un tué par an pour 80 km. Le rapport de 40 millions calcule une moyenne (un tué pour 202 km) qui n’a pas de sens car il intègre des routes peu circulées et aux caractéristiques géométriques qui ne permettent pas de dépasser le 70km/h (le réseau très local, le plus important).

Pour finir

En dernière page le document mentionne 4 accidents prétendument intervenus sur les axes expérimentaux, avec le commentaire : « En 2017, cela n’a pas l’air de s’arranger... ».

Une analyse succincte des quatre articles de presse cités en référence aurait permis aux auteurs de constater :

  • que deux de ces quatre accidents (RN57 à Betoncourt-les-Ménétriers, et RN7 à Tainl’Hermitage) sont intervenus en agglomération, donc en-dehors des sections expérimentales ;
  • et que trois de ces quatre accidents (RN57 à Betoncourt-les-Ménétriers, RN7 à Tainl’Hermitage et RN57 à Echenoz-le-Sec) sont intervenus au deuxième semestre 2017 (respectivement en septembre pour les deux premiers et novembre pour le troisième), donc après la fin de la période d’expérimentation.

Ainsi parmi les quatre accidents cités, un seul est réellement intervenu sur les sections expérimentales pendant la période d’expérimentation. Ce simple constat amène à s’interroger sur le souci de rigueur qui a pu conduire la démarche générale des auteurs du document.

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